"Le moment est venu de mobiliser une réelle volonté politique pour lutter contre le CRSV en RDC"

L'utilisation de la violence sexuelle en République démocratique du Congo (RDC) n'est pas un crime du passé. En 2020, la Mission de l'Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO) documenté 1,053 675 cas de violences sexuelles liées aux conflits (CRSV), affectant 370 femmes, 3 filles, 5 hommes et 177 garçons. 2022 auraient été perpétrés au cours de l'année dernière seulement. En XNUMX, une équipe d'experts internationaux sur la RDC rapporté que « [la RDC] connaît des conflits d'une violence exceptionnelle, impliquant des cas de viols et de violences sexuelles, alors que l'État peine à assurer à tous les citoyens la protection à laquelle ils ont droit. Ces conflits sont alimentés par des discours de haine et des appels à la violence et à la discrimination. De telles atrocités se poursuivront jusqu'à ce que les crimes fassent l'objet de réponses complètes en matière de justice et de responsabilité. En effet, l'impunité pour les atrocités passées est un facteur de risque et un prédicteur d'atrocités futures.

Lors de la conférence Preventing Sexual Violence in Conflict Initiative (PSVI) à Londres (28-29 novembre), le Dr Denis Mukwege, gynécologue de renommée mondiale, militant des droits de l'homme et lauréat du prix Nobel de la paix de l'est du Congo, a pris la parole lors d'une session spéciale à la UK House of Lords sur la nécessité d'assurer la justice et la responsabilité pour l'utilisation du CRSV en RDC.

Comme l'a indiqué le Dr Mukwege, depuis près de 30 ans, la RDC a été déchirée par des guerres d'agression répétées et des cycles de conflits qui ont conduit à l'une des crises humanitaires les plus dramatiques au monde, où le nombre de personnes tuées, singeant des femmes et des les déplacés se comptent par millions. Le Dr Mukwege a souligné que « la culture de l'impunité est l'un des principaux obstacles à l'établissement d'une paix durable en RDC et dans la région des Grands Lacs africains. Face à l'échec des solutions sécuritaires et politiques pour restaurer la stabilité, il est temps d'explorer la valeur ajoutée de tous les mécanismes de justice transitionnelle en RDC (…) combinant des mécanismes judiciaires et non judiciaires, qui sont complémentaires. Malheureusement, comme l'a souligné le Dr Mukwege, le système judiciaire de la RDC n'est pas équipé pour lutter contre l'impunité persistante du CRSV, minée par la corruption, l'ingérence politique et le manque d'indépendance.

Au cours de la session parlementaire spéciale, le Dr Mukwege a présenté un plan détaillé des mesures juridiques à prendre pour lutter contre l'impunité flagrante du CRSV en RDC.

Le plan comprend la création d'un Tribunal pénal international pour le Congo et/ou de chambres mixtes spécialisées, l'engagement continu de la Cour pénale internationale et les États faisant pleinement usage du principe de compétence universelle pour poursuivre les auteurs pour leur implication dans les atrocités commises au RDC.

Le plan comprend en outre la provision de réparations pour les victimes et les survivants du CRSV avec la création du Fonds national de réparations. Comme l'a déclaré le Dr Mukwege, « parmi les différents mécanismes de justice transitionnelle, l'une des principales revendications des victimes et des survivants est la justice réparatrice. La réparation est un droit et représente une mesure de justice. Elle reconnaît le préjudice causé et apporte un soutien à la victime pour lui permettre de mener à bien son processus de guérison et de reconstruire sa vie dans la dignité.

Enfin, le plan prévoit des mécanismes garantissant le droit à la vérité, la Commission nationale pour la vérité, pour traiter les récits niant ou déformant les informations sur les atrocités. Le Dr Mukwege a expliqué qu'un tel mécanisme « vise à faire la lumière non seulement sur les circonstances et les raisons qui ont conduit à la perpétration d'atrocités, mais également sur les causes profondes, les structures et les institutions qui les ont permises ou facilitées. L'établissement de la vérité constitue une garantie essentielle contre la répétition des violations.

Pour aider à cette étape cruciale pour garantir le droit à la vérité sur les violations flagrantes des droits de l'homme, l'Institut des droits de l'homme de l'Association internationale du barreau (l'IBAHRI) et les Fondations Panzi lancent une initiative vérité et justice en RDC qui vise à fournir une plate-forme pour les victimes et les survivants de violences sexuelles en RDC de pouvoir parler de leurs expériences, de leurs douleurs et de leurs souffrances, et de recueillir et de conserver les témoignages dans le cadre de l'histoire de la nation.

De telles initiatives en RDC sont nécessaires de toute urgence, car l'utilisation passée et actuelle du CRSV en RDC continue d'être négligée. Les mesures juridiques telles que celles que nous avons vues en réponse aux atrocités en Ukraine continuent d'être une exception. L'impunité persistante, comme nous en sommes témoins en RDC, est la triste réalité à laquelle les victimes et les survivants doivent faire face. Les États et la communauté internationale doivent être plus proactifs pour lutter contre le CRSV avec une litanie de mesures juridiques à leur disposition. Ils savent quoi faire. Ils ont vu ces mécanismes juridiques se déployer, plus récemment en réponse aux atrocités de Poutine en Ukraine. Ils le doivent aux victimes et rescapés du CRSV en RDC et au-delà.

Source : https://www.forbes.com/sites/ewelinaochab/2022/11/29/dr-denis-mukwege-the-time-has-come-to-mobilize-real-political-will-to-address- crsv-en-rdc/